Presque sans machine, parce que j'ai utilisé un four de cuisine électrique.J’ai fabriqué des châsses pour des vieilles lames à partir d’un objet dit « de décoration » en corne trouvé chez Emmaüs.
J’ai d’abord tracé largement contours des côtes sur la corne, (en évitant les rainures qui figuraient la séparation des plumes – ça a restreint mes possibilités de taille et de forme.) J’ai découpé au bocfil les morceaux dans chacun desquels je taillerai une côte.
Puis j’ai redressé les morceaux de corne en les contraignant à chaud. Pour ça, j’ai utilisé un petit étau métallique, des morceaux de fer plat, des serre-joints métalliques aussi, et un four de cuisine.
J’ai installé la corne entre les fers plats dans l’étau, j’ai serré doucement, et j’ai mis tout ça au four.
Quelques temps plus tard, la corne s’étant assouplie, j’ai serré davantage l’étau, et j’ai ajouté des serre-joints. Il était important que l’étau et les serre-joints soient tout de métal, pour ne pas craindre le passage au four.
L’étau avait l’avantage de former un ensemble solidaire et stable, qui facilitait le placement dans le four et l’installation des serre-joints.
J’ai resserré le tout de temps en temps, à mesure que la corne s’assouplissait. À la fin, tout était serré à mort (j’ai cassé plusieurs petits serre-joints en fonte à serrer trop fort.)
Concernant la température :
D’après les expériences de l’auteur de
cette vidéo, 150 °C (300 °F) est la température adéquate pour former la corne.
Pour mon premier essai, j’ai mis le four à 150 °C. Mes plaquettes de corne, relativement fines, n’ont subi qu’un faible jaunissement, et pas de fragilisation sensible.
La deuxième fournée à la même température a donné un fort jaunissement, et plus de fragilité, signes de surchauffe.
La troisième fournée, moins chaud pour éviter le problème, a donné aussi peu de jaunissement que la première. Pour cette dernière fournée, j’ai glissé un thermomètre de laboratoire dans le pour connaître la température réelle. Il indiquait 135 °C.
Le jaunissement semble ainsi n’avoir pas été fonction que de la température du four. Je suspecte vitesse de refroidissement importe aussi. Je sais que j’ai fait refroidir la deuxième fournée très lentement ; la troisième plus rapidement ; je ne me rappelle plus pour la première. Sur
cette vidéo expliquant la fabrication des peignes en corne, où la technique d’aplanissage semble donner un résultat parfait, on explique que la corne, dès qu’elle est déroulée, est mise dans une presse hydraulique dont chaque plaque est refroidie par eau, (refroidissement rapide, donc.)
Dans tous les cas, j’ai laissé sous contrainte vingt-quatre heures. Certaines plaquettes étaient légèrement voilées, mais toutes suffisamment planes.
(Je fais remarquer en passant que l’américain contraint la corne après chauffage, tandis que j’ai contraint pendant.)
Avant d’utiliser le four, j’avais essayé au-dessus d’un feu de barbecue, comme le biscailleur de la vidéo. J’ai brûlé les bords des morceaux de corne ; les parties fines étaient opaques, jaunes, cassantes, fichues. Les parties épaisses semblent utilisables. Dans tous les cas, j’ai des pièces de corne bien plates, (mais trop petites pour faire des châsses ; j'avais pris des échantillons pour essayer.) J’avais serré la corne entre des planchettes de bois, dans un étau, et je n’avais laissé refroidir sous contrainte qu’une heure environ. Cette méthode mérite davantage d’expérimentation.
Par ailleurs, toujours concernant la mise en forme de la corne à la chaleur, j’ai aussi essayé de dé-voiler des côtes après le montage de l’espaceur. J’ai mis la châsse, maintenue dans la forme à obtenir, à 60 °C dans le four, une quinzaine de minutes. Elle n’a pas gardé la forme imposée. J'en déduis que 60 °C ne suffisent pas.
Une fois la plaquette corne aplanie, j’ai régularisé l’épaisseur.
D’abord au couteau : j’ai fendu la corne dans la longueur comme on fend comme du bois. Avec circonspection ! car si la fibre « plonge » dans l’épaisseur de la plaquette, on retire facilement trop d’épaisseur.
Puis à la plane. Dans un étau, j’ai serré la plaquette de corne entre une planchette qui dépasse le moins possible du mors de l’étau, pour me laisser un débattement maximal, et une autre planchette qui doit supporter la corne sur toute sa longueur.
J’ai fini de régulariser l’épaisseur au papier abrasif, retirant du même coup les marques laissées par la plane.
Pour contrôler l’épaisseur de la corne en différents points, j’ai utilisé ce compas d’épaisseur à lecture directe.
Puis, dans mes plaquettes descendues à la bonne épaisseur, j’ai tracé, au moyen d’un gabarit en papier fort, le contour de mes côtes, et j’ai découpé les ébauches au bocfil. Ensuite, j’ai percé les trous des rivets dans une ébauche, j’ai superposé les deux ébauches, bien tenues dans un étau, et j’ai re-percé dans les trous de la première. Ainsi, les trous sont alignés.
Puis, pour que les deux côtes aient exactement le même profil tout en ayant les trous alignés, je lime les ébauches serrées ensemble dans un étau, avec des tenons dans les trous (tenons tenu en force par un morceau de papier glissé dans les trous ; ça « centre » les trous qui pourraient être légèrement plus gros l’un que l’autre, à cause d’un foret tordu, par exemple...) Puis j’ai chanfreiné le bord de chaque côte à la lime.
Voilà pour la fabrication des châsses. La suite raconte le reste du rechâssage.
Mes espaceurs devaient être d’épaisseur régulière : La pression exercée par mon rivet empêche la corne de poursuivre sa courbe au-delà du rivet, et l’écartement à la pointe est au moins le même qu’au niveau du rivet. Cela, car je serre fort mes rivets, car je n’utilise aucune colle, et donc l’espaceur doit être maintenu en place uniquement par l’étreinte des côtes.
Puis j’ai frotté le tout à la laine d’acier (ça adoucit les angles et produit une surface que je préfère largement à un poli) avant de donner un peu d’huile de lin.
Concernant le rivetage, il faut prendre garde à ce que le rivet soit serré bien « droit » (perpendiculaire au plan de la châsse.) Si le rivet est serré tordu, une côte est déportée par rapport à l’autre, et le rivet de pivot se retrouve de biais par rapport à la châsse, et le tranchant de la lame tombe sur une côte quand on referme le rasoir.
(J’explique la fabrication des rosettes
ici.)