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DE LA CORNE.
La corne est cette partie dure & folide qui naît sur la tête de quelques animaux à quatre pieds.
Son tissu paroîtêtreun composé de filets qui naissent par étages de toute la surface de la peau qui est dessous la corne. Tous ces filets érant réunis , collés & foudés ensemble par un.: humeur visqueuse qui les abreuve, forment autant de cornets de différente hauteur , qui font enchâssée les uns dans les autres , & prolongés jusqu'à la pointe de la corne ; d'où vient que cette pointe composée de toutes ces enveloppes, est fort folide , & que plus on approche de la base où ces cornets finissent par étages , plus on voit que l'épaisseur & la dureté de la corne diminuent.
Les ébénistes emploient une espèce de corne blanche , qu'on vend à Paris fous le nom de corne d'Angleterre, d'où elle est apportée dans de petits barils. Ce font de ces cornes dont les serblantiers . font aussi ufage pour sermer les lanternes.
On en vend de plus ou moins épaisses ; celles qui font les plus blanches , qui n'ont point de taches , &: qui font les plus transparentes , font les plus recherchées par les ébénistes , à moins qu'ils ne veuillent en faire de fausses écailles ; alors ils se servent de la corne rousse , qui imite , en quelque façon, le clsir de l'écaille , dont ils contrefont les nuances avec de la couleur.
On trouve la corne toute apprêtée, & il ne s'agit que du choix quand on veut en faire emplette.
Manière de teindre la Corne, de sorte qu'elle imite l'Êcaille.
II faut d'abord que la corne foit réduite en tablettes , en lames, ou autre forme plate ; ensuite otr prépare le mélange suivant.
Prenez deux parties de chaux vive & une partie de litharge; mêlez le tout ensemble, Síforracz-ert une pâte avec la lessive de favon.
Appliquez de cette pâte sur toutes les parties de la corne que vous voulez colorer, ayant foin de n'en pas mettre sur celles qui doivent rester transparentes , afin d'imiter le plus qu'il est possible l'écaille de tortue.
La corne doit rester couverte de cette pâte jusqu'à ce qu'elle soit tout-à-fait sèche; alors on brosse le tout, & on trouve la corne en partie opaque & en partie transparente , de sorte qu'on peut la prendre aisément pour de l'écaille, sur-tout si on la met sur une feuille de laiton, & qu'on la pare par dessous.
II faut de l'industrje & du jugement de la part de l'artiste pour disposer la pâte de manière à former une -variété de parties transparentes de différentes sigures & grandeur, semblables à ces jeux de la nature, qu'on rencontre assez souvent dans Fécaille.
II feroit encore mieux d'y pouvoir ajouter des parties à demi transparentes ; ce qui se fera en mêlant avee un peu de pâte quelque matière qui assoiblisse sa vertu , & en en répandant dans quelques endroits de la corne qu'on veut teindre : par ce moyen , on produira des taches rougeâtres , qui, si elles font entre-mêlées à propos , principa• iement fur les bords des parties obscures , augmenteront beaucoup la beauté de l'ouvrage, & fa ressemblance à la véritable écaille de tortue.
Autre manière de teindre la Corne en Écaille.
Prenez une once de litharge d'or, demi-once de chaux vive ; mêlez & broyez bien le tout ensemble avec de l'urine, tant que le mélange ne soit ni mou ni dur , mais en forme de bouillie ; vous en appliquerez fur la corne , & trois ou quatre heures après la corne fera colorée.
II ne faut cirer ni la corne , ni l'écaille ; mais on les polit en les frottant d'abord avec de la ponce broyée à l'eau, ensuite avec un morceau de peau de buífle & un peu d'huile d'olive , & de tripoli en poudre très-fine.
Manière d'amollir & de mouler la Corne.
On fait grand usage de la corne dans les arts. On s'en sert pour des manches de différens instrumens. On tire de l'extrémité, qui est solide, des cornets d'écritoire. On la dresse au feu; on l'amollit; on la lime & polit ; alors on y remarque des marbrures très-agréables.
Pour l'amollir , la mouler, & lui donner telle forme qu'on voudra , il faut avoir de l'urine d'homme, gardée pendant un mois ; on y met de la chaux vive & de la cendre grav«lée, ou de la lie de vin, le double de chaux, la moitié de cendres. Ajoutez fur une livre de chaux & une demilivre de cendres , quatre onces de tartre 6k autant de sel ; mêlez bien le tout ; laissez bouillir & réduire un peu le mélange ; passez-le ; gardez cette lessive bien couverte. Quand vous voudrez amollir la corne, laisscz-la reposer dedans, pendant une huitaine de jours.
Autrement. Ayez des cendres de tiges & têtes de pavots ; faites-en une lessive , & faites-y bouillir la corne.
°u ayez de la cendre de fougère , autant de chaux vive; arrosez le tout d'eau; faites bouillir;
réduisez un peu le mélange ; laissez-le se reposer 8c se clarifier ; transvasez : ayez ensuite des raclures de cornes ; jetez-les dans cette lessive ; laissez-les y pendant trois à quatre jours ; oignez-vous les mains, d'huile, pétrissez la corne & la moulez.
Autrement. Ayez jus de marrube blanc , d'ache , de millefeuille, de raifort , de chèlidoine, avec fort vinaigre ; mettez la corne tremper là-dedans , & l'y laislez pendant huit jours.
Autrement. Ayez cendre gravelèe & chaux vive ; faites comme une lessive ; mettez-y de la raclure de corne ; faites bouillir la raclure dans la lessive i elle se mettra en pâte facile à mouler. On pourra même , en ajoutant de la couleur, teindre la pâte.
M. Papillon , célèbre graveur en bois , qui enseigne ces divers procédés, prétend qu'ils réussiront non-feulement fur la corne, mais même fur l'ivoire.
Manière d'amollir les Os & l'ivoire.
II ajoute que pour amollir les os , il faut prendre les portions creuses de ceux des jambes, avoir du jus de marrube, d'ache, de millefeuille , de raifort , avec fort vinaigre, en parties égales ; en remplir les os, bien boucher les ouvertures , enforte que la liqueur ne puisse sortir ; les enterrer en cet état dans le crottin , & les y laisser jusqu'à ce qu'ils soient mous.
Pour l'ivoire & les os, on dit qu'il suffit de le» faire bouillir dans de fort vinaigre.
Ayez aussi du vitriol romain , du sel réduit en poudre ; arrosez le tout de fort vinaigre ; distillez.
Le résultat de cette distillation , sera ramollissement des os & de l'ivoire qu'on y laissera séjourner. Et si on fait passer delà ces substances dans le suc de bettes, elles s'attendriront tellement , qu'elles prendront des empreintes de médailles , qu'on rendra durables en mettant d'abord les pièces imprimées dans le vinaigre blanc, & ensuite dans de • l'eau de puits fraîche.
Au reíte , ces effets rapportés dans l'ancienne Encyclopédie & dans différens autres ouvrages , doivent être assurés par l'expérience.
Autre manière de rendre la Corne flexible & de l'amollir.
Non-feulement la corne & l'écaille deviennent flexibles, mais elles peuvent être amollies au point de se mouler & de se souder. II est aisé d'employer ces matières pour des montures de microscopes , ou pour quelque autre usage; d'en faire des tuyaux ou d'autres .pièces creuses , en procédant de 1a manière suivante.
Pour faire un canon ou tuyau , coupez la feuille de corne ou d'écaillé de la grandeur convenable a votre dessein; amincissez avec la lime les deux bords qui doivent se joindre, afin qu'étant l'un sur l'autre , il n'en résulte qu'une épaisseur égale à celle de la pièce.
Amollissez dans l'eau bouillante cette pièce ainsi préparée ; & lorsqu'elle sera suffisamment souple , tournez - la promptement sur un cylindre de fer , assujetti par un bout dans un étau , & échauffé au point de commencer à fondre l'écaille ou la corne. Couvrez la jonction des deux bords avec un autre ser également chaud & un peu creusé en gouttière; serrez ces deux sers en les liant ensemble par les deux bouts avec du fil de ser recuit, dont Vous tordrez les deux bouts réunis avec une pince ; & laissez le tou t se refroidir. II en résultera une foudure qui ne s'appercevra point quand la pièce fera travaillée".
Les ouvriers qui ont fouvent de ces sortes de foudures à faire , ont de grosses pinces de différentes formes & grandeurs, qu'ils font chaufser , & avec lesquelles ils serrent les parties qu'ils ont intention de fouder.
Si vous voulez faire une pièce creuse comme un cyl-de-lampe , un couvercle, une cuvette, &c. il fa ut avoir un moule de cuivre de la grandeur convenable , & qui sera en dépouille ou évidé comme un poids de marc ; il faut aussi avoir une autre pièce massive de cuivre qui ait extérieurement la même forme, mais plus petite, afin qu'il y ait un intervalle entre elle & la pièce creuse.
Vous arrondirez drculairement une seuille de corne ou d'écaille , vous la placerez sur le moule creux, & par dessus vous mettrez la deuxième pièce de cuivre, & le tout fous une petite presse de ser ; vous plongerez cette presse, avec ce qu'elle contient , dans l'eau bouillante ; & à mesure que la corne ou l'écaille s'amollira , vous serez agir la presse pour l'cnfoncer dans le moule ; après quoi vous serez refroidir le tout hors de l'eau fans desserrer la presse.
Si vous n'avez que quelques petites pièces à mouler ainsi, vous pourrez vous dispenser d'avoir une presse ; il sufhra de tenir pendant quelques minutes la corne ou l'écaille dans l'eau bouillante pour l'amollir , de faire chauffer les deux pièces du moule, & de la presser dans l'étau du laboratoire.